Les matières textiles. Elles nous collent à la peau, et pourtant on ne les connait pas toujours bien. J’ai préparé ce guide des matières textiles pour vous aider à les identifier et comprendre les enjeux environnementaux et sociaux qui les entourent. Ce guide a été construit en classifiant les matières éco-responsables des matières à éviter. J’espère qu’il vous aidera à déchiffrer les étiquettes de vos vêtements!
Les matières premières utilisées dans l’industrie textile
Connaissez-vous les deux grandes familles des matières utilisées pour produire nos vêtements? Il s’agit des matières naturelles et des matières chimiques.
Les matières naturelles sont produites à partir de plantes ou d’animaux : elles sont d’origine végétale comme le coton, le lin, le liège, ou d’origine animale comme le cuir, la laine etc. Elles représentent 1/3 des matières commercialisées.
Les matières chimiques, qui représentent les 2/3 des matières commercialisées, regroupent les matières chimiques et les matières synthétiques. Les fibres chimiques proviennent d’une transformation chimique de substances naturelles (généralement de la cellulose). Les fibres synthétiques, elles, sont produites à partir de polymères d’hydrocarbures (pétrole), à l’aide de procédés industriels extrêmement polluants.
On aurait tendance à penser que les matières naturelles ont tout bon, et que les matières chimiques sont suspicieuses, voire toxiques. La réalité est plus nuancée. Faisons le point matière par matière avec ce guide des matières textiles.
Les matières végétales
Les fibres végétales sont à priori éco-responsables puisqu’elles proviennent de plantes. Il est vrai qu’elles sont biodégradables et recyclables pour la plupart, deux atouts de taille dans la gestion de fin de vie des produits. Néanmoins toutes ne sont pas aussi eco-friendly qu’il n’y parait.
A éviter
Le coton conventionnel
Le coton conventionnel a un impact environnemental affreux pour plusieurs raisons : le cotonnier est une plante fragile, cultivée à grand renfort d’engrais, pesticides et insecticides. Les chiffres sont vertigineux : selon l’OMS, la culture du coton occupe 3% des surfaces cultivées mondiales, mais consomme 25% des insecticides utilisés dans le monde ! L’usage intensif de pesticides et fertilisants contamine les cours d’eau, dégrade la santé des sols et des populations locales qui se retrouvent atteintes de maladies chroniques graves.
Le cotonnier est aussi extrêmement gourmand en eau – la production d’un tee-shirt requiert 2700 litres d’eau à lui seul – ajoutant encore plus de pression à l’accès à l’eau dans les endroits où elle se fait de plus en plus rare.
S’ajoute à cela l’étape du blanchiment du coton à force de chlore pour obtenir cette couleur blanche, signe de pureté aux yeux des consommateurs, et les exemples de travail forcé dans les champs de coton en Ouzbekistan ou dans les usines de confection dans la région Ouighour de la province du Xinjiang, en Chine.
Vous l’aurez compris, le bilan écologique et humain du coton conventionnel est désastreux : des écosystèmes entiers, faune, flore et populations locales sont mis en danger dans la culture de cette fibre qui représente près du quart des matières commercialisées.
A privilégier
Le coton biologique
Le coton bio est cultivé sans pesticides, insecticides ou engrais chimiques, et sans OGM. Sa culture requiert également moitié moins d’eau par rapport au coton conventionnel. Enfin, le coton biologique est blanchi à l’eau oxygénée et non au chlore. Les teintures doivent être réalisées sans substances cancérigènes ou métaux lourds.
Le label le plus strict de coton bio est le label GOTS (Global Organic Textile Standard) car il certifie que l’ensemble de la chaine de production est eco-responsable et éthique. Un produit certifié GOTS sera composé « d’au moins 95% de fibres biologiques certifiées”, et aura été confectionné dans le respect et la dignité humaine, et des conventions de l’Organisation Internationale du Travail.
Il faut noter qu’une plante de coton bio produit moins de rendements qu’un coton conventionnel. Le produit final plus cher pour les consommateurs, d’autant plus que la certification GOTS est aussi payante pour les marques et fabricants.
Le lin
Le lin est l’une des fibres les plus écologiques, et une de mes matières préférées. L’eau des pluies lui suffisant, elle ne requiert quasiment pas d’irrigation et très peu d’engrais. Elle est également une fibre locale, que l’on retrouve majoritairement le long des côtes d’Europe de l’Ouest, où le climat océanique est idéal à sa culture. La France est le premier producteur de lin au monde (cocorico!), avec 80% de la production mondiale, suivie par les Pays-Bas, la Belgique, l’irlande et l’Italie.
Pour aller encore plus loin, vous pouvez faire le choix d’un lin biologique (cultivé sans pesticides ni OGM) ou du lin certifié « Masters of Linen » qui garantie que la culture, filature et tissage ont été réalisé en Europe, dans un souci de circuit court et de valorisation des savoir-faire européens. Enfin le lin est une fibre « zéro déchet » car toutes les parties de la plante sont valorisées. La fibre longue pour le textile, la fibre courte pour le papier ou la corderie, les graines en huiles alimentaires ou cosmétiques. Même les fibres trop épaisses sont utilisées par exemple comme matières isolantes.
Le lin est non seulement durable et résistant, mais il est également recyclable et biodégradable. Il présente de nombreux avantage pour les consommateurs: léger, résistant, absorbant et thermorégulateur. Chaleur en hiver, fraicheur en été!
Le chanvre
Le chanvre est également une matière écologique par excellence ! Naturellement antibactérien et antifongique, la culture du chanvre ne nécessite pas de traitements chimiques ou d’irrigation et assure un très bon rendement. Le chanvre absorbe beaucoup de CO2 et permet même de régénérer le sol. Encore une fois, la France est le leader mondial de la production de chanvre, suivie par la Chine. Pour le consommateur, le chanvre a l’avantage d’être très résistant, biodégradable et n’irrite pas la peau.
Et pour ceux qui se demandaient: non le chanvre ce n’est pas du cannabis! Il s’agit de plantes cousines (elles appartiennent à la même espèce, Cannabis sativa L), mais la teneur en THC, la substance psychoactive du cannabis, est très très faible (moins de 0.2%). Sa production est tout de même très réglementée et surveillée.
Le liège
Encore une matière qui a tout bon ! 100% naturel et biodégradable, le liège n’est autre que l’écorce de l’arbre chêne-liège, qui est retiré sans abîmer ou abattre l’arbre. Le liège est naturellement renouvelable: l’écorce se régénère entre deux cycles de récolte (tous les dix ans) et forme du liège par photosynthèse (1 kg de liège absorbe 50 kg de CO2). Cette matière provient principalement du bassin méditéranéen (Portugal, Espagne, Maroc et Algérie). Son traitement est assez peu couteux en énergie et en produits chimiques, puisqu’il consiste à faire sécher le liège, le presser et le couper en fines lamelles. Cette matière peut être une belle alternative naturelle et végane au cuir.
Les matières animales
Les matières animales ont été utilisées depuis les débuts de l’humanité pour la confection, entre autres, de vêtements et accessoires. Néanmoins leur utilisation dans l’industrie textile est de plus en plus discutable pour des questions environementales et d’exploitation animale.
Les matières animales sont au coeur d’enjeux éthiques (le bien-être animal), écologiques (l’élevage intensif qui engendre déforestation et dégradation de l’environement) et socio-économiques (le maintien de l’emploi de savoir-faire artisanal). Si vous n’êtes pas prêt à devenir végane, voici quelles pistes pour vous orienter vers les matières plus responsables et éthiques.
A éviter
La fourrure et les duvets naturels
Plumage à vif, chaine d’approvisionnement opaques, élevage intensif en cage, abattage cruel d’espèces sauvages à des fins esthétiques…. ces matières empreintes de maltraitance animale sont à boycotter. Privilégiez le synthètique ou les matières recyclées pour les poils autour des capuches de vestes d’hiver ou les doublures de doudounes.
L’angora
L’angora désigne un type de poils soyeux et abondant chez plusieurs espèces comme la chèvre, le lapin, le mouton, etc. Dans l’industrie textile, l’angora provient quasi-exclusivement des lapins du même nom, qui en sont dépourvu soit par la tonte, soit par épilation au peigne soit par arrachage à vif des animaux, eux même enfermés en cages. Selon les enquêteurs de PETA Asia cette dernière méthode est la plus répandue en Chine, qui produit 90% de la laine Angora.
Cette méthode cruelle serait également pratiquée en France selon les enquêteurs de One Voice qui ont sonné la tirette d’alarme à plusieurs reprises sur les violences de l’élevage et l’exploitation des lapins angoras. Comme il n’existe aucune garantie pour le consommateur ou de label garantissant la transparence et le respect des animaux, il vaut mieux passer son chemin.
La soie conventionnelle
La soie est une matière animale provenant des chenilles Bombyx Mori ou bombyx du mûrier, aussi appelées vers à soie. Une fois transformés en chrysalides, ces dernières se recouvrent d’un épais cocon nacré, le fil de soie. Seulement la technique la plus répandue pour obtenir le fil consiste à plonger les cocons dans de l’eau bouillante pour tuer la chrysalide et récupérer le fil de soie. Un processus cruel. Heureusement il existe une alternative plus éthique.
A privilégier
La peace silk ou soie « cruelty free »
Cette alternative plus éthique et cruelty free à la soie conventionelle consiste à récolter les cocons après éclosion de la chrysalide, lorsque le papillon a pris son envol. Comme les cocons ont été cassés, on n’obtient pas un seul et unique fil, mais des fils plus courts qui sont rattachés ensemble en noeud. C’est pourquoi vous verrez des « petites boules » sur le tissu qui sera toujours soyeux mais avec plus de texture. Cette production éthique, plus minutieuse et plus longue ne représente aujourd’hui qu’une très faible part de la soie sur le marché.
La Laine Mérinos « Mulesing-Free », européenne ou certifiée RWS (Responsible Wool Standard)
La majorité de la laine que l’on retrouve dans nos pulls est issue du mouton merinos. La tonte de la laine, bien que stressante pour les animaux, reste néanmoins bénéfique. La toison du mouton ne tombe pas naturellement, et la tonte lui permet de rester en bonne santé. Tous les enjeux éthiques de la laine tiennent donc à la façon dont sont traités et élevés les animaux.
Une grande partie des élevages de mouton merinos sont situés en Australie, où une pratique cruelle qu’on appelle « Mulesing » a encore lieu dans des élevages peu scrupuleux. Le Mulesing consiste à retirer la peau autour de la queue des moutons pour lutter contre la myase : des mouches qui pondent des larves dans les replis humides de la peau, ce qui provoque des infections. La pratique se fait souvent sans anesthésie, et laisse leur chair à vif.
Pour une alternative plus respecteuse des animaux, privilégiez de la laine europénnée (le Mulesing n’est pas pratiqué en Europe), certifiée « Mulesing-Fee » ou labellisée RWS (Responsible Wool Standard), qui garantie entre autres le respect du bien-être de l’animal.
Le mohair éthique ou Made in France
Comme son nom ne l’indique pas, le mohair est une appellation donnée au pelage des chèvres angoras! Le mohair est majoritairement produit en Afrique du Sud, au Lesotho, aux Etats-Unis et en Turquie. Comme il y a eu également des pratiques scandaleuses d’élevage et d’exploitation animale (reportées par PETA), il est recommandé de se tourner vers des labels comme le RMS (Responsible Mohair Standard) qui certifie le bien être des chèvres et l’exploitation durable des terres qui les nourrissent. Et afin de privilégier la chaîne de fabrication la plus courte possible, privilégiez un mohair français ou européen.
L’alpaga
Animal cousin du lama, l’alpaga est élevé sur de hautes altitudes dans la cordillère des Andes en Amérique Latine. Il est donc très résistant au froid et a une faible empreinte écologique, puisqu’il ne détruit pas les sols et ne broute pas les plantes jusqu’aux racines comme la chèvre. La tonte de l’alpaca fait partie d’un cycle naturel car l’animal ne perd pas naturellement sa toison et a besoin d’une tonte annuelle, généralement en été. La laine d’alpaga est très douce et plus légère que celle du mouton. Elle requiert également peu ou pas de teinte chimique car elle existe naturellement en un large éventail de couleurs.
A vous de voir
Le cachemire certifié « Responsible Cashmere Standard » ou « The Good Cashmere Standard »
Cette fibre de luxe, naturelle et extremement douce provient du duvet des chèvres cachemire élevées dans les steppes mongoles et le désert de Gobi, situés entre la Mongolie (le pays) et la Mongolie Intérieure (région autonome de Chine), ainsi que dans l’Himalaya.
Depuis les années 2000, et fâce à la demande croissante de l’industrie de la mode, les élevages de chèvres dans ces régions se sont intensifiés, le nombre de chèvres a explosé, contribuant au surpaturage et à un désastre écologique. Le problème avec la chèvre, c’est qu’elle ne broute pas simplement l’herbe, elle arrache complétement les racines. Cela entraine une dégradation du paturage année après année, un apprauvissement des sols et une désertification des terres. Et face à cet écosystème dégradé, on remarque que la qualité du duvet (cachemire) est en baisse. Il existe cependant des méthodes d’élevage plus éco-responsables et éthiques de cette matière noble.
Pour cela, il faut se tourner vers des marques qui s’approvisionent auprès de coopératives de cachemire responsable, se procurant du cachemire labellisé « The Good Cashmere Standard » (fondé par une organisation non profit, Aid by Trade Foundation) ou le tout récent « Responsible Cashmere Standard« . Ces labels permettent d’attester d’une traçabilité de la fibre et garantir que la production du cachemire se fait dans le cadre des meilleures pratiques, aussi bien dans la gestion du paturage que le respect du bien etre animal. Ils assurent également aux éleveurs un revenu stable et plus important, ce qui aide à la réduction cruciale de la taille des troupeaux.
Le cuir
Le cuir est une matière issue de la peau animale, transformée pour être rendue imputrescible. Le terme « cuir vegan » est donc erroné. Le cuir est une matière qui divise fortement selon les opinions personnelles. Le cuir est normalement un sous-produit de l’industrie de la viande et provient de peau de bêtes déjà abbatues à des fins alimentaires. Mais en plus de potentielle maltraitance animale que cela engendre, l’industrie de l’élevage est extrémement polluante. Elle serait responsable de 20% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, consomme énormément d’eau et de ressources alimentaires, et est également liée à la déforestation et la pollution des eaux.
Ensuite vient l’étape du tannage (minéral ou végétal) pour rendre la peau imputrescible, c’est-à-dire éviter qu’elle ne se décompose avec le temps. Du type de tannage utilisé va dépendre le reste de l’impact environemental du cuir.
- Le tannage minéral (85 % de la production mondiale de cuir). Cette technique requiert un grand nombre de produits toxiques, mais elle est également la plus répandue en raison de sa rapidité et du fait qu’elle permet de mieux fixer la couleur dans le temps que le tannage végétal.
- Le tannage végétal (15 % de la production mondiale). Cette technique utilise une majorité d’ingrédients naturels, ce qui permet de réduire la pollution et les problèmes de santé. Elle demande cependant beaucoup plus de temps, ce qui explique pourquoi elle est encore peu utilisée aujourd’hui.
Le cuir est une matière robuste et durable, ce qui procure une forte longévité aux produits. Si vous tolérez cette matière, choisissez le sans chrome et de préférence au tannage végétal. Pensez également à vérifier que le cuir est certifié par le Leather Working Group. Trois niveaux de certification sont accordés (Bronze, Silver et Gold) aux tanneries qui minimisent leur impact environnemental, à chaque étape de la chaîne de production.
Les alternatives au cuir
Il faut rester vigilant face aux alternatives au cuir, toutes ne se valent pas. Je pense notamment à ce qu’on appelle du « similicuir » ou « skai » qui, si elles n’entrainent pas de souffrance animale, sont en fait des dérivés de plastique (PVC) très mauvais pour la santé.
On trouve également de plus en plus d’alternatives vegan et écologiques fabriquées à partir de résidus végétals comme la pomme, l’ananas, le raisin , le cactus, ou les champignons. Il faut savoir que dans la grande majorité des cas, cette matière est enduite à de la résine de PU (Polyuréthane), un matériel plastique, pour apporter impérméabilité et résistance. Une fois le processus terminé, le polyuréthane représente jusqu’à 50% de la matière finie.
Au-delà de leur composition, ces matières seraient, selon certain·e·s professionnel·le·s du secteur, moins résistantes et moins durables que le cuir animal. A vous de choisir votre camp en fonction de vos valeurs personelles !
Les matières textiles artificielles (ou semi-synthétiques)
Les fibres artificelles sont des créations de l’homme, obtenues grâce à un procédé chimique et mécanique qui recrée des fibres à partir d’un élément végétal ou naturel. Elles sont dans l’industrie textile fabriquées à partir de la cellulose de végétaux (protéine naturellement présente dans le bois) comme la pulpe de bois, d’eucalyptus ou de bambou, et donc considérées comme biodégradables.
Le principe de fabrication général est le même: la cellulose est extraite chimiquement de la pulpe d’un végétal, puis trempée dans un bain de solvant pour obtenir une pâte qui va être transfomée en fibre.
Ces tissus issus de ces fibres présentent de nombreux avantages: résistants, respirants (absorbent bien l’humidité) et soyeux, d’où leur comparaison à de la soie. Ils sont également faciles d’entretien car ils ne se froissent pas.
L’un des leader des fibres articielles cellulosiques est l’entreprise autrichienne Lenzing, qui la première a développé la viscose (ou rayonne), considérée comme la 1ère génération, suivie par le procédé Modal de 2nde génération et enfin le procédé Lyocell, ou 3e génération. Nénamoins de plus en plus de fabricants fabriquent désormais leurs propres versions de ces fibres, avec un impact plus ou moins néfaste sur l’environnement.
Le premier défi que pose les fibres artificielles est lié à la déforestation: la demande croissante pour ces fibres entraine l’accroissement des surfaces de culture forestière, qui bien souvent prennent la place de forêts tropicales ou forêts anciennes, bien plus riches en biodiversité. Pour répondre à ce danger, l’organisme Canopy, qui a pour mission la conservation des forêts vierges, prône une exploitation durable des ressources forestières, en travaillant en partenariat avec les fabricants de fibres cellulosiques.
Il faut également noter que les plantations en mono-culture (une unique espèce d’arbre) épuisent les sols et sont davantage vulnérables aux tempêtes, incendies et ont une moins bonne résistance face aux épidémies. Il est donc important de s’assurer de la traçabilité de la chaine d’approvisionnement.
Enfin, ces procédés de transformation sont en général de grands consommateurs d’eau et de produits chimiques, qui peuvent s’avérer toxiques. La manière dont ces éléments vont être traités vont déterminer l’impact, néfaste ou neutre sur l’environement. Nous allons donc voir lesquelles sont à éviter et celles à favoriser.
A éviter
La viscose / Rayonne (rayon en anglais)
Aussi connue sous le nom de soie artificielle ou rayonne, la viscose est une fibre artificielle créée à partir de cellulose provenant de l’eucalyptus, du coton ou du bambou. Les fibres végétales sont dissoutes dans un bain d’acide sulfurique pour en extraire la cellulose, qui est ensuite plongée dans un bain de disulfure de carbone pour la transformer en pâte.
Ce processus est très mauvais pour l’environement et pour les personnes qui travaillent ces matières: les produits chimiques utilisés sont non seulement toxiques, et en plus ils ne sont en général pas recyclés. Dans les pays en voie de développement, où est fabriquée la viscose, ceux-ci sont rejetés dans la nature et polluent les éco-systèmes. Il s’agit du processus le moins cher à mettre en place, d’où sa large utilisation dans l’industrie textile.
Certaines viscoses sont fabriquées à partir de végétaux provenant de forêts gérées durablement, labellisées FSC (Forest Stewardship Concil) et/ou PEFC (Programme de reconnaissance des certifications forestières). Ces labels certifient que les arbres proviennent de forêts gérées durablement, et que les droits des travailleurs sont respectés. C’est un pas en avant, mais le processus de transformation reste tout de même polluant.
A privilégier
L’ECOVERO™ par Lenzing
L’ECOVERO™, marque déposée par Lenzing, est une viscose « éco-responsable ». Le processus de fabrication est plus écologique car il suit des normes strictes imposées par l’EU Eco Label, qui récompense les produits dont l’impact environnemental est faible sur toute la chaîne : matières premières, fabrication, distribution et fin de cycle de vie.
La fibre ECOVERO™ utilise des sources de bois durables (certifiées FSC® ou PEFC®) et suit un processus de production écologique en circuit fermé: l’eau et les produits chimiques mais non-toxiques utilisés au cours du processus de transformation sont recyclés et réutilisés. Ce processus génère jusqu’à 50% moins d’émissions et de consommation d’eau, en comparaison à la viscose conventionnelle.
Le Modal ™ par Lenzing
Le Modal™, la 2ème génération de fibre cellulosique créée par Lenzing, est créé à partir de cellulose issue du bois de hêtre de forêts européennes. Le solvant utilisé dans la fabrication du Modal® est le Sulphate de Sodium, qui est ensuite récupéré jusqu’à 95%, et revalorisé dans d’autres industries. Le processus de fabrication n’est donc pas totalement fermé. Les fibres de Modal™ donnent un tissu ultra doux.
Le Micromodal est conçu à partir d’une fibre plus fine. Il y aura donc une plus grande concentration de fibres dans le vêtement, ce qui permet un rendu plus soyeux et élégant.
Le Lyocell, ou TENCEL™ Lyocell (marque déposée par Lenzing)
Le procédé de fabrication Lyocell, 3e génération de fibre cellulosique dévelopé par Lenzing est le plus respecteux de l’environement, et TENCEL™ est le nom des fibres ainsi conçues, déposé par Lenzing. Dans le cas du TENCEL™ la cellulose est extraite de l’eucalyptus (une plante qui nécessite peu d’eau) qui provient d’exploitations forestières certifiées (FSC® ou PEFC®). Le TENCEL™ est créé en « circuit fermé » à l’aide d’un solvant non toxique, le N-methylmorpholine-N-oxide (NMMO). Après utilisation, le solvant est recyclé à 99,77%, purifié puis réinjecté dans le processus de fabrication du Tencel®
Tous les types de Lyocell ne se valent pas. Les autres fabriquants de Lyocell utilisent généralement de la pulpe de bois de hêtres, pins ou de chênes. Dans ce cas, vérifiez qu’il est bien issu de forêts gérées durablement.
TENCEL™ x REFIBRA™ par Lenzing
Le REFIBRA® est une technique de fabrication, développée par Lenzing, qui produit une fibre de Lyocell fabriquée en partie de matériaux recyclés. Elle est en effet conçue à partir d’un mélange de pulpe de bois et de coton revalorisé à hauteur de 30%, provenant de chute de coton de l’industrie textile ou vêtements et textiles usagés (post-consommation). Ensuite, le procédé de fabrication est le même que le Tencel®. Il s’agit de la première matière artificelle cellulosique qui s’inscrit dans une démarche circulaire de recyclage et de revalorisation des matières.
Le Cupro® ou Bemberg®
Dans le cas du Cupro®, on obtient du fil à partir du linter de coton, une fibre courte et duveuteuse qui entoure les graines du cotonnier, généralement considérée comme un déchet. Le linter est dissous dans une solution de cuprammonium, qui est un mélange de cuivre et d’ammonium, avant d’être filé en fibres – d’où son petit nom de « cupro ». Ce traitement chimique se fait en circuit fermé, c’est-à-dire qu’on réutilise l’eau et le cuprammonium jusqu’à leur épuisement.
Aussi connu sous le nom de «Bemberg» (du fabricant allemand JP Bemberg), le Cupro® appartient maintenant au fabricant japonais Asahi Kasei Corporation. Il s’agit à ce jour de la seule usine labellisée OEKO-TEX, assurant un processus non toxique ou dangereux pour la santé et pour l’environnement. La production est également certifiée GRS (Global Recycled Standard), qui garantit que les matières et produits utilisés dans la fabrication du produit sont bien recyclées.
Le Naia™
Produit aux Etats-Unis par l’entreprise américaine Eastman, le Naia™a fait son entrée sur le marché des fils cellulosiques en 2017. Le Naia™ est fabriqué à base de pulpe de pins et d’eucalyptus provenant exclusivement de forêts gérées durablement (certifiées FSC® ou PEFC®). Cette fibre est également à faible impact puisqu’elle est fabriquée en circuit fermé, autrement dit l’eau et les solvants sont recyclés pour être réutilisés dans la chaine de fabrication.
Les matières textiles synthétiques
Les fibres synthétiques sont fabriquées par synthèse de composés chimiques, issus presque exclusivement d’hydrocarbures, autrement dit de pétrole. Le pétrole est une ressource non renouvelable qui prend des millions d’années à se former, dont le processus d’extraction est extrêment polluant, et qui en plus n’est pas biodégradable une fois transformé.
Pour continuer le tableau pas jojo, les composants de ces matériaux présentent des problèmes sur notre santé : ils peuvent être toxiques, allergènes, contenir des perturbateurs endocriniens qui pénétrent dans l’organisme et peuvent générer des cancers ou autres maladies graves.
Au cours du cyle de vie des vêtements synthétiques, ces matières continuent de polluer en rejettant des microparticules de plastique lors du passage en machine à laver. Ces dernières se retrouvent dans les milieux aquatiques, et finalement dans nos assiettes.
Il est également compliqué de recycler ces matières car elles sont souvent utilisées en petites proportions dans la fabrication de nos vêtements. Enfin une fois jetés dans les décharges ces vêtements ne se décomposent pas. Ils rejettent alors du CO2 et autres gaz à effet de serre dans l’atmosphère, ce qui contribue au réchauffement climatique.
Les fibres synthétiques ont connu une forte croissante depuis leur apparition au milieu du 20e siècle. La production, historiquement dominée par l’Europe et les États-Unis s’est massivement délocalisée en Asie et particulièrement en Chine. Les fibres synthétiques ont largement dépassées les fibres naturelles aujourd’hui. Elles présentent l’avantage d’être résistantes, légères, facile d’entretien et bon marché. D’où leur large utilisation dans les enseignes de fast-fashion ou les marques souhaitant produire moins cher, au détriment de notre santé et de celle de la planète!
A éviter
Toutes, si possible:
- Polyester: comme il représente 70% des fibres textiles synthétiques utilisées dans les vêtements, on le retrouve un peu partout dans nos garde robes. D’après le WWF, il faut environ 1,5 kg de pétrole pour produire 1 kg de polyester. On en produirait 40 millions de tonnes par an (données de 2015), ça en fait de la pollution…
- Acrylique: si on trouve l’acrylique principalement dans la peinture (mais c’est vrai ça!), elle est également utilisée dans l’industrie textile: fausses fourrures ou encore pulls, où on la trouve souvent mélangée avec d’autres fibres afin de rendre les habits plus souples et plus faciles d’entretien
- Polyamide/nylon: on le retrouve dans nos collants, lingerie, vêtements de sport, doublures…. Et même dans les brosses à dents et filets de pêche (ceci n’est pas un argument pour ne plus se laver les dents!)
- Elasthanne. Aussi connue sous le nom de Spandex ou Lycra (ce dernier étant une marque déposée). On la retrouve souvent en petite quantité dans nos vêtements pour son élasticité – qui peut par ailleurs allonger la durée de vie du vêtement (et oui ce n’est pas si simple!) – mais il s’agit ni plus ni moins que de polyurethane (PU) en version fibre élastique.
- Polyurethane: on le retrouve parfois dans des jeans pas à la compo pas tout à fait clean.
A privilégier
A défaut de pouvoir se passer totalement de ces matières, surtout pour les vêtements techniques, il est préférable de se tourner vers des vêtements confectionnés à partir de fibres synthétiques recyclées. Ces alternatives permettent d’économiser l’énergie et les émissions liés à la fabrication d’une matière vierge (de première main). Elles s’inscrivent également dans une démarche de zéro déchets et d’économie circulaire.
Les matières recyclées peuvent provenir de chutes de production (comme le fil Q-NOVA® par exemple), de déchets post-consommation comme les bouteilles d’eau (polyester ou PET recyclé) ou encore de filets de pêche récupérés comme dans le cas de L’Econyl®, ce qui participe à nettoyer les océans des déchets plastiques qui les polluent. Cherchez aussi le label Global Recycled Standard qui garantie que le produit final est composé d’au moins 50% de fibres recyclées.
Enfin ces matières sont certes plus eco-friendly dans leur fabrication, mais elles rejettent tout de même des micro-particules au moment des lessives. Pour empêcher cela la solution est d’utiliser un sac de lavage, le Guppy Friend, qui permet de limiter à plus de 90% le rejet de micro-particules de plastique dans l’eau de votre machine.
Petit aparté: je me suis rendue compte en faisant mes recherches que le label GOTS accepte de labelliser des produits qui contiendraient 5% de matières synthétiques max. Un produit peut donc être bio, certifié GOTS et contenir de la matière synthétique type Spandex… D’où l’importance de regarder les étiquettes pour savoir ce que l’on achète !
Pfiou ça en fait de la lecture ! Si vous êtes encore là, bravo! J’espère que ce guide des matières textiles vous aura aidé à comprendre comment elles sont fabriquées, et les enjeux qui les entourent.
N’hésitez pas à apporter des précisions – je ne suis pas une experte sur ce domaine – ou me donner votre avis, je serais ravie de poursuivre la discussion en commentaire.
xx, Alice
Pour approfondir vos connaissances sur la mode éco responsable, je vous recommande dans cet article 7 livres sur le sujet
Et parce qu’il n’y a rien de plus éco-friendly que les vêtements qui existent déja, je vous conseille de jeter un oeil aux 10 bonnes raisons de consommer de seconde-main